La ferme des Acacias


Au pays du jambon de Bayonne, à quelques encablures de la sous-Préfecture des Pyrénées-Atlantiques, la ferme des Acacias prend les couleurs de la vente directe. Depuis plusieurs années, elle change de cap et de pratiques pour proposer des spécialités basques super star.

Devinette. Sachant que Pierre Colet avait l'âge de son fils Yohan lorsqu'il a hérité d'un hectare de terres de ses parents, qu'il a aujourd'hui deux fois plus d'années que sa progéniture, combien de bougies vient de souffler Johan ? Trente ! Un âge canonique dans cette ferme familiale. Il y a 30 ans, mon père a commencé sur une toute petite surface agricole et a fait le choix de créer un atelier de naissage de porcelets qu'il vendait alors à d'autres producteurs, explique Johan avec son léger accent de là-bas.

Trois ans plus tard, Pierre achète une porcherie pour engraisser les cochons lui-même, puis 25 hectares qu'il cultive en maïs pour nourrir ses bêtes. Nous sommes dans les années 80/90, la mode est au circuit long. Les producteurs produisent, les grossistes achètent, les transformateurs transforment, les distributeurs distribuent et les agriculteurs s'éloignent peu à peu des consommateurs.

Le salut de la vente directe

Lorsque Johan revient sur la ferme en 2014 après un passage par les banques et la formation agricole, il lui faut trouver des moyens de se sortir un salaire. S'agrandir encore et toujours ? Impossible dans cette zone périurbaine, très proche de Bayonne. Intensifier la production ? Ce n'est pas l'esprit de la maison. Père et fils décident alors de prendre le chemin de la vente directe. Mon projet d'installation s'est porté sur la construction d'un laboratoire de transformation, explique le jeune homme qui a dû emprunter 280 000 euros pour ériger un bâtiment de 190 m2 aux normes. Johan part également se former à l'école de la viande à Aurillac spécialisée dans la charcuterie fermière garantie sans additif ni colorant.

À la ferme, on a toujours tué le cochon pour nous, on avait déjà nos recettes pour le boudin, le pâté, les saucisses... lorsque je me suis installé, j'ai inventé le reste.

Johan qui aime les produits typiques et authentiques, relève ses spécialités avec du poivre ou du piment d'Espelette. Dans mes saucissons, il y a juste 10% de gras, je dénerve à la main toute la viande. Je veux faire des produits de qualité, pas du volume. Parmi ses spécialités figure le chichon qui, dans la région, ne se fume pas mais se rapproche des fritons ou des grattons. Notre pâté de campagne fabriqué selon une recette de ma grand-mère a été médaillé au concours agricole. C'est une belle récompense sentimentale.

Aujourd'hui Johan et son père poursuivent la mue de leur ferme. Côté alimentation des cochons, ils ont troqué les tourteaux de soja de l'autre bout du monde contre de la fèverole locale, achètent leurs céréales à des producteurs voisins, récupèrent le petit lait des fromageries alentours. Dans le même temps, ils ont arrêté les truies, réduit leur cheptel et engraissent leurs cochons pendant une année complète quand les élevages industriels se contentent de 6 mois. D'ici la fin de l'année, les cochons grandiront sur la paille et à terme, Johan rêve d'un grand séchoir pour affiner ses jambons.

J'aime le fait d'être mon propre patron, de travailler dans la nature, de réaliser mes charcuteries et d'obtenir la reconnaissance des clients, confie le trentenaire. Et puis, avec 1/3 de porcs en vente directe je génère autant de chiffre d'affaires que les 2/3 réservés en circuits traditionnels. Autant continuer dans cette voie, non ?